L’impact économique du Brexit en France sera très limité - Ministre
Union européenne - Brexit - Covid-19 - Entretien de M. Clément Beaune, secrétaire d’État auprès du ministère de l’Europe et des affaires étrangères, chargé des affaires européennes, à « La Provence »
(Arles, 28 décembre 2020)
Q - Le Royaume-Uni va se séparer définitivement de l’UE le 31 décembre à minuit. Quelles en seront les conséquences économiques pour la France et l’Europe en particulier ?
R - Le 31 décembre marquera un changement inédit : un État quitte l’Union européenne. C’est beaucoup plus un problème pour le Royaume-Uni que pour nous. Avec l’accord que nous avons trouvé, après de longs mois de négociation, la France et l’Europe sont bien armées. En tout état de cause, nous nous assurerons que c’est bien le cas. Il n’y aura aucun droit de douane entre le Royaume-Uni et le marché européen, et les Britanniques devront respecter toutes nos règles, toutes nos normes pour exporter vers chez nous. C’était la condition indispensable pour que nous acceptions un accord, dont les Britanniques avaient beaucoup plus besoin que nous. Le Brexit n’est une bonne nouvelle pour personne, mais son impact économique en France sera très limité. Il y a une préoccupation particulière pour la pêche, dans le Nord et l’Ouest, mais nous avons défendu les intérêts de nos pêcheurs et nous les accompagnerons.
Q - Sommes-nous bien préparés aux changements induits par le Brexit ?
R - Oui ! Il y aura des contrôles à partir du 1er janvier : des contrôles douaniers et sanitaires sur les marchandises qui circulent entre la France et le Royaume-Uni. Le fait qu’il y ait un accord n’y change rien, il faut que nos entreprises l’aient bien en tête. Là aussi, les services de l’État les accompagnent : nous avons recruté 700 douaniers supplémentaires, plus de 300 vétérinaires et près de 300 policiers aux frontières, car il y aura aussi des contrôles renforcés des Britanniques qui se rendent en France.
Q - Quelles sont les conséquences politiques du Brexit pour les institutions européennes ?
R - On aurait tort de croire que le Brexit est une crise britannique isolée. Le référendum a révélé des tendances à l’oeuvre partout en Europe, et au-delà. D’abord les manipulations et les mensonges, les promesses qui ne se réalisent pas. Le Brexit consiste finalement à priver le Royaume-Uni du plan de relance européen, à payer près de deux fois plus cher les vaccins contre la Covid, à priver les jeunes du programme d’échanges Erasmus, tout en devant respecter nos règles pour accéder à notre marché. En termes de souveraineté, on fait mieux !
Cela devrait tous nous faire réfléchir aux mensonges populistes. Mais ce vote a aussi montré un malaise à l’égard de l’Europe auquel nous devons répondre : car en effet, l’Union européenne ne protégeait pas assez, a souvent incarné un libéralisme naïf croyant au doux commerce mondial et à la concurrence à tout prix. Ce fut une faute. Mais les Européens ont ouvert les yeux, rangé leur naïveté au placard, à l’égard de la Chine notamment, affirmé leur ambition pour le climat, commencé à bâtir une Europe de la défense et aujourd’hui de la santé. C’est encore très imparfait, trop lent, mais l’électrochoc du Brexit nous a soudés et renforcés.