Métaux stratégiquement importants : rapport de la House of Commons

Lors de l’installation, le 30 mars 2011, du Comité pour les métaux stratégiques (COMES), Eric Besson, ministre chargé de l’industrie, de l’énergie et de l’économie numérique, a rappelé que "le fonctionnement dit en flux tendu de l’industrie fait qu’une ressource manquante, fut-elle accessoire, déstabilise toute une chaîne de production [...] Sécuriser l’approvisionnement en métaux stratégiques des industriels français est donc une priorité pour le gouvernement". La même préoccupation est tangible au Royaume-Uni, et le Select Committee de la House of Commons a publié le 17 mai 2011 un rapport intitulé "Strategically important metals". Ce rapport, ainsi que la réponse du gouvernement, rendue publique le 14 septembre 2011, font l’objet de cet article.

Introduction

Les métaux sont omniprésents et essentiels pour assurer la qualité de vie à laquelle les sociétés modernes sont habituées. Présents en quantités variables dans la croûte terrestre, ces éléments sont distribués de façon inégale à l’échelle de la planète. La pénurie d’approvisionnement en certains métaux, pour des raisons économiques ou géopolitiques, pourrait avoir un impact considérable sur les industries les utilisant et par conséquent sur les économies des pays dépendant de ces industries.

Fin 2010, par exemple, lorsque la Chine a imposé un embargo sur ses exportations de terres rares à destination du Japon, dans un premier temps, puis des Etats-Unis et de l’Europe, l’attention des médias du monde entier s’est subitement tournée vers ces matériaux d’une importance considérable dans l’industrie des technologies de pointe et bas carbone. Cet embargo nous a permis de prendre conscience du quasi monopole exercé par la Chine sur la production mondiale des terres rares, satisfaisant plus de 95% de la demande mondiale en termes de production [1]. Au-delà des terres rares, un certain nombre d’autres éléments ont des propriétés leur conférant un rôle crucial dans l’industrie. Tous ces éléments sont regroupés sous la dénomination de "métaux stratégiques".

L’inquiétude concernant la sécurité de l’approvisionnement en métaux stratégiques a incité le Select Committee de la House of Commons à conduire une enquête permettant d’évaluer 1) la vulnérabilité du Royaume-Uni en cas de pénurie globale en approvisionnement et disponibilité des métaux stratégiques essentiels à l’industrie des technologies de pointe, 2) le rôle du gouvernement pour garantir non seulement l’approvisionnement mais également son éthique (prise en compte des conditions de travail dans le pays source, de l’impact sur l’environnement...), 3) l’importance du recyclage, de la récupération et l’existence de substituts, et 4) les opportunités de collaboration internationale dans ces domaines.

1. Contexte

Définitions et terminologie

Sur les 94 éléments naturels, 72 sont des métaux et font partie intégrante de la vie quotidienne : le fer dans les matériaux de construction, le cuivre pour les installations électriques, le cobalt en tant qu’élément de base dans la plupart des implants médicaux, l’indium pour les écrans tactiles, le bore pour fabriquer des aimants essentiels dans les éoliennes et les moteurs électriques, le lithium dans les batteries... La liste est sans fin.

Exemples d’utilisation de cuivre dans les câbles électriques, de lithium dans les piles et de chrome et cobalt dans les implants dentaires
Crédits : Giovanni Dall’Orto, Mk2010 et Sescoi CAD/CAM

Si la Commission Européenne et le ministère américain de l’énergie parlent des métaux en tant qu’éléments "critiques" (rapport importance et sécurité/rareté), le présent rapport traite de métaux "stratégiques", importants pour tout utilisateur britannique, avec, en fonction des orientations du gouvernement, un intérêt particulier pour le cobalt, indium, néodyme et lithium, métaux ayant des applications technologiques très spécifiques. Si les terres rares sont des métaux stratégiques, tous les métaux stratégiques ne sont pas des terres rares, et les députés considèrent les terres rares, les éléments du groupe platine ainsi que les autres éléments importants pour les utilisateurs britanniques comme métaux stratégiques, invitant le gouvernement à utiliser une terminologie appropriée pour éviter toute confusion.

Certains éléments non métalliques ont également une importance stratégique et bien qu’en dehors du cadre de cette enquête, les députés invitent le gouvernement à expliquer les mesures envisagées pour faire face aux risques posés par la potentielle pénurie en hélium.

Bien que conscient de cette potentialité, le gouvernement ne dispose pas à l’heure actuelle d’informations suffisantes pour juger de l’étendue de ce problème ni de l’inquiétude qu’elle suscite dans le secteur privé.

Importance des métaux stratégiques au Royaume-Uni

Les terres rares font partie intégrante de la transition souhaitée par le gouvernement britannique vers une énergie bas carbone et sont également très importantes dans les secteurs industriels du transport, de la défense et de la sécurité.

Si le Royaume-Uni est moins vulnérable que certains pays vis-à-vis d’une pénurie en approvisionnement en métaux stratégiques (le Japon et l’Allemagne sont par exemple beaucoup plus vulnérables car plus grands consommateurs), de nombreux secteurs de l’économie britannique sont d’ores et déjà dépendants d’une grande variété de métaux et de la stabilité de leurs prix.

Rôle du gouvernement

Le gouvernement reconnaît son rôle dans l’apport d’une information sur les ressources au secteur privé et il est raisonnable de penser que cette information inclut les métaux d’importance stratégique pour la Royaume-Uni. Les députés ont conclu qu’il serait bénéfique pour l’industrie que le gouvernement définisse 1) le(s) ministère(s) en charge des métaux stratégiques, 2) le ministère fournissant l’information sur les ressources, 3) la régularité avec laquelle cette information sera mise à jour et 4) la façon dont cette information est partagée au sein du gouvernement et à destination du secteur privé. En accord avec le récent rapport du Defra (Department for environment, food and rural affairs, ministère de l’environnement, de l’alimentation et des affaires rurales), les députés sont de l’avis qu’une base de données partagée aiderait le secteur privé, mais également le gouvernement, à comprendre les risques futurs liés aux ressources.

Dans sa réponse, le gouvernement clarifie les ministères concernés par cette thématique et leurs attributions et rôles respectifs :
- Business, Innovation and Skills (BIS, Ministère des entreprises, de l’innovation et des compétences) effectue le lien avec l’industrie et s’occupe des restrictions en termes de quotas d’exportation, par exemple ;
- Defra est en charge des problèmes liés aux déchets, recyclage, récupération, impacts environnementaux et efficacité énergétique ;
- Foreign and Commonwealth Office (FCO, Ministère des affaires étrangères et du Commonwealth) est chargé des relations diplomatiques.

Le gouvernement s’assure que les représentants de ces trois ministères travaillent en étroite collaboration et avec d’autres ministères si nécessaire (défense, transport, finances). La nécessité d’une base de données est à l’étude.

2. Economie et géopolitique

Le Resource Efficiency Knowledge Transfer Network (REKTN, réseau de transfert de connaissances dans le domaine du rendement en ressources) a identifié huit dangers concernant la sécurité de l’approvisionnement pour un matériel donné :
- niveaux de consommation globale ;
- manque de remplacement (élément de substitution) ;
- effets du changement climatique ;
- quantité de matériel extrait pour produire une quantité donnée de métal ;
- rareté ;
- monopole de l’approvision-nement ;
- instabilité politique dans les régions clés en approvisionnement ;
- et vulnérabilité au changement climatique de ces régions.

Approvisionnement en métaux

A la question de savoir si l’épuisement des ressources en métaux dans les prochaines décennies est envisageable, la réponse de la communauté scientifique et industrielle est sans appel : non. Lors d’un débat organisé par la Royal Academy of Engineering (RAEng, Académie royale d’ingénierie) en novembre 2011 sur la thématique des ressources, d’un colloque germano-britannique organisé à l’Ambassade britannique à Berlin début décembre 2011 par le Science and Innovation Network (SIN, Réseau des attachés scientifiques britanniques) et d’une conférence donnée par Andrew Mackenzie (BHP Billiton) à la Geological Society (Société géologique de Londres) le 14 décembre, les conclusions ont été sans appel : la croûte terrestre renferme toutes les ressources dont nous avons besoin pour les décennies à venir. A plusieurs reprises a été mentionnée l’anecdote selon laquelle "the stone age did not stop because we ran out of stones" (l’âge de pierre n’a pas pris fin par manque de pierres) signifiant ainsi que le moment venu, les technologies auront évolué, les méthodes de recyclage et de récupération améliorées, et la question de l’épuisement des ressources sera moins d’actualité.

Les réserves [2] en métaux stratégiques sont distribuées de façon non uniforme à la surface du globe et varient d’un métal à l’autre. Au rythme actuel de consommation, il est prévu, par exemple, que les réserves d’indium s’épuiseront d’ici 13 ans, tandis que celles en platine vont perdurer pendant 360 ans.

En pratique, une amélioration des technologies, l’utilisation de matériaux alternatifs et la découverte de nouvelles réserves vont préserver l’accès aux métaux stratégiques. Des coûts monétaires et environnementaux significatifs seront cependant associés à l’exploitation de minerais de moindre qualité.

Monopoles nationaux

Un des principes de l’économie de marché libre est qu’il y a un nombre de producteurs rivalisant pour approvisionner des consommateurs. Si un monopole ou un oligopole domine le marché, que ce soit pour des raisons économiques, politiques, géographiques ou environnementales, il en résulte une distorsion des prix. Cinq pourcent seulement des réserves mondiales en métaux étant localisées en Europe, le Royaume-Uni est particulièrement sensible à cette problématique.

Les députés invitent le gouvernement à exposer les résultats de son enquête sur les quotas d’exportation instaurés par les autorités chinoises, et, afin de maximiser les bénéfices du marché libre, le gouvernement devrait s’assurer que les restrictions en termes de marché des métaux stratégiques soient discutées à un niveau international, via des forums tels l’OMC (Organisation mondiale du commerce), le G20 et l’Organisation de Coopération et de Développement Economiques (OCDE).

Le gouvernement informe les députés de la décision de l’OMC de décréter incompatibles avec les règles en vigueur au sein de l’OMC les restrictions de quotas imposées par la Chine. Le gouvernement s’engage à participer à des discussions à un niveau international dans la perspective de promouvoir des marchés ouverts et transparents.

Demandes en métaux

Le Research Council UK (RCUK, organe de tutelle des conseils de recherche britanniques) mentionne, dans sa réponse adressée aux députés, la demande croissante de métaux en provenance d’économies émergentes telles le Brésil, la Russie, l’Inde et la Chine (BRIC). Entre 2006 et 2030, la demande en gallium pourrait ainsi être multipliée par un facteur 20, tandis que pour la même période, les demandes en indium, germanium et néodyme pourraient être multipliées par 8, 8 et 7, respectivement, par rapport aux taux de consommation actuelle.

La croissance globale de la demande en métaux stratégiques en provenance des BRIC sera un facteur significatif affectant leurs prix, et par conséquent leur disponibilité. L’évaluation de la demande future est essentielle pour juger de la potentielle pénurie, des risques en termes d’approvisionnement et des futurs prix. Elle devrait être incluse à part entière dans la base de données proposée ci-dessus.

Le gouvernement suggère que l’approche appropriée est, dans un premier temps, de focaliser une telle base de données sur l’approvisionnement et non la demande. Les données d’approvisionnement sont en effet plus robustes, tangibles, celles sur la demande plus incertaines car requérant un suivi dans le temps.

Réponse du marché

Pour illustrer l’impact de l’offre et de la demande sur le prix d’une ressource, prenons l’exemple du rhénium donné par la Minor Metals Trade Association (MMTA, regroupement industriel pour les métaux mineurs) : un kilogramme de rhénium coûtait $300 en 1996, et $10.000 en août 2008. Malgré cela, l’approvisionnement est toujours suffisant, car le métal est utilisé plus efficacement, recyclé, et le prix stimule l’investissement dans les activités minières.

Cet exemple illustre dans quelle mesure l’offre et la demande peuvent mener à des fluctuations significatives dans le prix des métaux. Si ce genre de fluctuations peut être absorbé par des grandes entreprises ou par l’utilisateur, les petites et moyennes entreprises peuvent être plus affectées. Les députés souhaitent que le gouvernement mette en place des structures adéquates pour atteindre les PME dans tout le pays, rôle précédemment rempli par les Regional Development Agencies (RDA, agences régionales de développement) et recommandent au gouvernement de s’entretenir avec les PME utilisant des métaux stratégiques, pour établir : 1) leurs connaissances des problèmes liés à l’approvisionnement en ressources, 2) la façon dont les PME risquent d’être affectées, et 3) quelles sont les informations concernant l’approvisionnement en ressources dont les PME ont besoin afin de se préparer aux changements du marché et maximiser leur rentabilité.

Dans le cadre du plan d’action sur la sécurité des ressources (Action plan on resource security) que le gouvernement s’engage à publier courant février 2012, celui-ci entend interagir avec les entreprises et regroupements industriels. Les KTN ont d’ores et déjà établi un groupe d’intérêt spécial permettant de sensibiliser les entreprises, notamment les PME, aux problèmes d’approvisionnement en métaux stratégiques et à une meilleure gestion des ressources tout au long de la chaîne d’approvisionnement.

Stockage

Le stockage de métaux stratégiques est une option coûteuse mais qui peut s’avérer nécessaire si le marché s’écroule suite à une manipulation de la part d’un fournisseur ayant le monopole du marché. Les députés invitent le gouvernement à suivre de près cette politique d’action.

Le gouvernement reconnaît que l’entreposage à finalité de manipulation de marché est contraire à son approche économique de marché libre et rappelle la position qu’il a adoptée dans un document soumis à la Commission Européenne : "la commission doit rester vigilante afin d’éviter des réponses protectionnistes, telles que l’entreposage à l’échelle d’Etats ou de l’UE, aux contrôles unilatéraux de l’exportation effectués par certains pays ...".

Spéculations sur les marchés des métaux

La perception de la pénurie de certains minéraux et métaux conduit à une spéculation sur leur approvisionnement et à une volatilité de leurs prix. Avoir des informations détaillées et fiables concernant la pénurie potentielle en métaux stratégiques est par conséquent un prérequis pour le gouvernement britannique. Si les réserves en métaux stratégiques ne semblent pas à l’heure actuelle être source d’inquiétude, c’est l’aptitude à approvisionner les utilisateurs britanniques qui pose problème. Bien que des solutions alternatives soient déjà envisagées, notamment pour les terres rares par exemple, l’exploitation de minerais de moindre qualité, en dehors de la Chine, permettant par la même occasion à des nations de développer leur économie via les revenus miniers, le réel besoin est, pour le gouvernement britannique, d’identifier le ministère en charge des informations concernant les ressources en métaux stratégiques, de leur mise à jour, et de leur dissémination à destination des industriels. Le gouvernement doit également être en mesure de définir les quantités de métaux stratégiques présents dans la chaîne des déchets et dans les produits importés finis et semi-finis ; identifiant ainsi les moyens de récupération des métaux stratégiques tout en donnant l’opportunité au secteur privé de réaliser un potentiel économique en termes de récupération et recyclage.

Si l’industrie britannique de recyclage du métal recycle 90%, en poids, des déchets collectés, l’inquiétude est que certains métaux stratégiques, souvent présents en très petite quantité dans des produits, soient perdus dans les 10% non recyclés. Pour ces métaux, une approche "craddle-to-craddle" (littéralement, "de berceau à berceau"), dans laquelle les produits sont conçus en ayant à l’esprit leur démantèlement futur, est fortement suggérée.

Le gouvernement soutient l’engagement du G20 à améliorer la réglementation, le fonctionnement et la transparence des marchés financiers et des marchés des matières premières. Les autorités britanniques sont intégralement impliquées, développant des solutions appropriées pour atteindre cet objectif.

Domination du marché

Il a été porté à l’attention des députés une domination du marché exercée par de grosses compagnies sur le London Metals Exchange, J.P. Morgan étant l’une d’entre elles.

Le gouvernement confirme l’implication de l’Office of Fair Trading (équivalent du bureau de la concurrence) sur la question.

REACH

Il semblerait qu’une mauvaise interprétation de la réglementation européenne REACH (Registration, Evaluation, Authorisation and Restriction of Chemical Substances) au sein de certaines PME conduise celles-ci à déclarer des métaux lorsque cela n’est pas nécessaire. Les députés recommandent au gouvernement 1) de réévaluer les informations et conseils disponibles pour les PME au sujet de REACH, en particulier en ce qui concerne la manière la plus efficace, en termes de coûts, de déclarer des métaux stratégiques et 2) d’examiner si ces réglementations sont devenues un fardeau inutile inhibant le marché des métaux stratégiques.

L’autorité britannique compétente pour la réglementation REACH fournit informations et conseils via un site Internet et un bulletin électronique envoyé à 13.000 utilisateurs. La Commission Européenne conduit à l’heure actuelle une évaluation de REACH et des "leçons apprises" et le gouvernement travaille de concert avec l’industrie britannique pour rassembler des informations pertinentes quant aux impacts de REACH.

3. Impacts environnementaux et sociétaux de l’extraction des métaux

La moitié des problèmes mondiaux de pollution est liée à l’activité minière. L’extraction des métaux requiert bien souvent de grandes quantités d’énergie, pouvant avoir une empreinte carbone considérable si les énergies utilisées ne sont pas renouvelables.

Réglementation

La nature globale de la production et des réserves métallifères signifie que le gouvernement britannique ne peut pas directement réglementer les coûts sociétaux et environnementaux de l’extraction et de la production des métaux utilisés au Royaume-Uni. Il y a cependant un certain nombre de mesures qui peuvent être mises en oeuvre pour améliorer l’éthique de la production des métaux de par le monde.

Les députés sont inquiets de savoir que le Companies Act 2006 [3] semble être ignoré au lieu d’être mis en application. Ils invitent le gouvernement à expliquer 1) quels sont les conseils donnés aux entreprises en termes de compte-rendu des informations sociétales et environnementales, 2) quelles sont les mesures prises pour vérifier les informations données par les entreprises dans leurs bilans et 3) quelle action est envisagée à l’encontre des entreprises ne se soumettant pas aux conseils prodigués.

Le Accounting Standards Board ainsi que le Defra publient des conseils pour aider les entreprises à respecter le Companies Act 2006. La Natural Environment White Paper a de plus récemment issu de nouveaux conseils qui entreront en application en 2012. Le Financial Reporting Review Panel est quant à lui responsable de la mise en application du Companies Act 2006, et des mesures correctives sont prises à l’encontre des entreprises ne s’y soumettant pas.

Action unilatérale

La réglementation internationale est le meilleur moyen de s’assurer que les entreprises d’extraction britanniques respectent les standards sociétaux et environnementaux dans leurs activités minières à l’étranger. Les députés souhaitent que le gouvernement l’informe de son intention de discuter ces problèmes dans des forums internationaux.

Le gouvernement soutient la proposition de la Commission Européenne d’exiger des entreprises d’extraction listées dans l’Union Européenne de révéler les paiements effectués auprès des gouvernements étrangers. Ceci permettra aux citoyens des pays en question de tenir leurs gouvernements responsables des revenus perçus. Le gouvernement s’engage à tenir les députés informés de la progression de cette initiative.

Labellisation

Lorsque des systèmes de labellisation, permettant de tracer l’origine des métaux de la mine au marché, sont volontairement mis en place, les députés sont de l’avis que le gouvernement doit soutenir et encourager leur mise en pratique.

Le gouvernement informe les députés que le site Internet du FCO fournit des informations sur la façon dont les entreprises peuvent tracer l’origine des métaux utilisés.

Obtenir un accord équitable pour les pays en développement

Etant donné que la grande majorité des réserves mondiales en métaux stratégiques sont localisées dans les pays en développement, il y a une opportunité pour ces pays de bénéficier des revenus de l’extraction minière. Dans les années 2000, la Zambie par exemple percevait 0,6% des revenus de l’extraction du cuivre, taux absolument inconcevable. Des revenus équitables permettraient aux gouvernements de ces pays d’améliorer les conditions sociales et environnementales de leurs citoyens et les députés recommandent que le gouvernement, via la représentation britannique au FMI, promeuve une politique de revenus équitables dans les pays en développement.

Les activités minières artisanales, notamment dans un pays comme la République Démocratique du Congo, fournissent un moyen de subsistance pour ses citoyens mais sont bien souvent, en partie, responsables de guerres civiles. Dans certains cas où des conduites inappropriées ont été rapportées, les députés engagent le gouvernement à collaborer avec l’OCDE pour faire en sorte que des enquêtes soient menées et que les conseils appropriés soient dispensés aux points de contact nationaux.

Les directives de l’OCDE ne sont en aucun cas un substitut aux lois locales en vigueur ou autres réglementations. Elles représentent des principes et standards de bonne pratique non légaux et il y a très peu d’appétence au sein des membres de l’OCDE pour changer ce statut ou introduire des sanctions à l’égard de violations potentielles. De même, les points de contact nationaux n’ont pas vocation à imposer des sanctions ou autres pénalités.

Le point de contact national du Royaume-Uni, basé au BIS et financé en partie par le Department for International Development (DFID, Ministère pour le développement international), a cependant effectué des changements positifs via la mise en place de procédés de conciliation/médiation.

4. Efficacité de l’utilisation des métaux

Cycle de vie et conception des produits

Dans notre société consumériste, la récupération et le recyclage ne sont bien souvent pas des actions innées. Utiliser une approche "craddle-to-craddle" dans la conception de produits, permettant de rendre aux fabricants les produits en fin de vie pour les démanteler et les réutiliser, est cependant un moyen très efficace de gérer des ressources limitées, dont les métaux stratégiques. Xerox a ainsi par exemple revu la conception de ses produits afin de pouvoir les démanteler aisément en fin de vie et en utiliser des parties dans d’autres produits. Il s’avère que ces produits peuvent ainsi avoir jusqu’à sept vies, et le procédé en lui-même est deux fois plus profitable que de refabriquer un objet. Il est de l’avis du Design Council que pour chaque 100 £ investies dans la conception d’un produit, une entreprise peut escompter un retour sur investissement de 225 £.

Les députés souhaitent encourager l’approche "craddle-to-craddle" dans la conception de produits et une conception intelligente est la clé de sa mise en application. Il est essentiel de construire des réseaux et de faciliter la communication entre fabricants, designers et waste processor. A cet effet, les députés souhaitent que le gouvernement 1) continue à encourager le travail des KTN, et 2) encourage l’incorporation du design durable dans la chaîne de fabrication et dans la chaîne de traitement des déchets.

Le gouvernement travaille en collaboration avec les chaînes d’approvisionnement sur une série de mesures destinées à améliorer l’efficacité des ressources utilisées via un design plus durable des produits. De plus, il soutient continuellement le travail de WRAP (Waste & Resources Action Programme, Programme d’action pour les déchets et les ressources) et du TSB (Technology strategy board, agence britannique de l’innovation) qui mettent en pratique des mesures d’efficacité de l’utilisation des ressources, particulièrement celles qui sont les plus stratégiques pour l’économie britannique, attirent l’attention des entreprises sur la sécurité des matériaux via les KTN, et développent un marché pour la réutilisation et le recyclage. Le TSB a mis en place une compétition dans le domaine d’une R&D collaborative et innovante dans la chaîne d’approvisionnement, destinée à aider les entreprises à développer des produits et technologies à même de minimiser les risques liés à la sécurité des matériaux. De même, les recherches effectuées par WRAP ont permis de démontrer les bénéfices environnementaux et commerciaux et la viabilité technique du recyclage de plastiques d’origines diverses. La première installation de recyclage de plastiques mixtes, avec une capacité de 20.000 tonnes par an, ouvrira ses portes en avril 2012.

Encourager le recyclage

Dix milliards de téléphones portables ont été vendus dans le monde depuis 1994 et la production annuelle est d’un milliard d’unités. Il y a 40 éléments différents qui entrent dans la composition d’un téléphone portable : un téléphone d’un poids moyen de 100 g renferme 13,7 g de cuivre, 0,189 g d’argent, 0,028 g d’or et 0,014 g de palladium. Il y a ainsi 300 g d’or par tonne de téléphones portables et d’ici 2012, la quantité de téléphones qui seront jetés correspondra à l’équivalent de 21 Boeing 747 ! Un raisonnement similaire s’applique pour les ordinateurs : il y a autant d’or dans une tonne d’ordinateurs que dans 17 tonnes de minerai d’or.

Les députés encouragent le gouvernement à soutenir les initiatives destinées à réutiliser les métaux présents dans les ’déchets’. Le manque d’information concernant la teneur en métaux stratégiques dans les produits finis ou semi-finis et leur localisation dans la chaîne des déchets sont également deux raisons pour lesquelles tant de métaux sont perdus. A cet effet, les députés souhaitent que le gouvernement conduise une étude sur les ressources métallifères : leur présence dans les produits finis, semi-finis et les déchets, étude incluant une estimation de la valeur marchande de ces ressources.

Une quantité significative d’informations détaillées concernant les métaux stratégiques est détenue par les entreprises et une approche partenariale entre les entreprises et le gouvernement est nécessaire. Cette possibilité sera explorée dans le plan d’action du gouvernement. Des données sont d’ores et déjà connues, et un rapport rédigé par WRAP, par exemple, montre qu’une meilleure efficacité de l’utilisation des ressources pourrait réduire la demande en terres rares de 13 à 14% d’ici 2020.

Législation DEEE

Les déchets d’équipements électriques et électroniques (DEEE) sont une catégorie de déchets constitués d’équipements en fin de vie, fonctionnant à l’électricité ou via des champs électromagnétiques, ainsi que les équipements de production, de transfert et de mesure de ces courants et champs. Une directive européenne ayant pour objectif un meilleur recyclage des produits électriques et électroniques limite cette catégorie aux matériels consommant moins de 1.000 Volts en courant alternatif et 1 500 Volts en courant continu. Au delà, ils sont considérés comme des déchets industriels [4].

L’industrie britannique de recyclage du métal recycle 90%, en poids, des déchets collectés, et des quantités substantielles de platine, rhodium, palladium, or et argent sont ainsi récupérées. Certains métaux stratégiques, présents en petite quantité dans les produits, sont cependant potentiellement perdus dans les 10% qui ne sont pas recyclés. Les députés se disent satisfaits que le gouvernement travaille en collaboration avec les industries pour considérer la façon dont la directive DEEE pourrait être améliorée avec un système de responsabilité individuelle du producteur. Si les députés souhaitent que le gouvernement continue à travailler avec l’industrie, ils souhaitent également qu’il interagisse avec d’autres partenaires européens pour conduire une analyse de rentabilité dans le cadre de l’extension de la réglementation DEEE aux déchets commerciaux et industriels.

Le gouvernement informe les députés que dans le cadre des négociations actuelles concernant la reformulation de la directive DEEE, des propositions d’augmentation des objectifs de collection sont faites (la Commission propose 65% du poids des équipements électriques et électroniques, alors que le parlement européen suggère 85% du poids des déchets d’équipements électriques et électroniques générés). La directive DEEE et la réglementation britannique s’appliquent déjà aux déchets commerciaux et industriels. Le gouvernement s’attend à ce qu’un nouvel objectif de collection s’applique entre entreprise et consommateur d’une part, et d’entreprise à entreprise d’autre part. BIS travaille actuellement sur une étude d’évaluation d’impact du texte qui a été accepté après les premières négociations en mars. De plus, un groupe de travail du BIS dirigé par l’industrie étudie la question de responsabilité individuelle du producteur et la façon de l’appliquer au Royaume-Uni.

Exportation des déchets métalliques

Les déchets électroniques et électriques représentant une ressource potentielle pour le Royaume-Uni, il semble insensé de les exporter, et les députés souhaitent que le gouvernement s’attèle activement à cette problématique et réduise les exportations. De plus, l’exportation de ces déchets revient en quelque sorte à exporter les problèmes environnementaux qu’ils causent. Les députés recommandent que lorsque l’exportation doit avoir lieu, le gouvernement travaille en étroite collaboration avec le gouvernement du pays importateur afin d’encourager des standards environnementaux de haute qualité et des pratiques de travail adéquates.

Le commerce global des déchets pour réutilisation, recyclage et récupération génère des bénéfices économiques significatifs pour l’utilisation globale des ressources, réduisant les émissions de carbone et permettant d’atteindre les objectifs de recyclage. Les contrôles des exportations de déchets pour recyclage ne permettent pas au gouvernement de restreindre ce commerce unilatéralement, mais fournissent une protection pour les pays importateurs. Une condition à l’exportation est que les déchets soient manipulés sans mettre en danger la santé humaine et dans un environnement convenable. Le gouvernement s’engage à encourager l’agence environnementale britannique à combattre le commerce illégal des déchets en utilisant leurs techniques de pointe et leurs connaissances.

5. Extraction domestique

Exploiter les réserves potentielles

Des dépôts inexploités de différents métaux stratégiques sont présents au Royaume-Uni, mais la viabilité économique de leur extraction est incertaine. Les députés souhaitent que le gouvernement travaille avec le British Geological Survey (BGS, Bureau de recherche géologique britannique) pour avoir une compréhension détaillée et actualisée des ressources minérales domestiques potentielles.

Le gouvernement informe les députés qu’il travaille d’ores et déjà avec BGS, les KTN et le TSB. A noter qu’il existe peu d’informations concernant les métaux stratégiques dont il est question dans ce rapport, car ils avaient peu d’intérêt économique dans le passé et n’ont pas fait l’objet d’études systématiques.

Impact de l’extraction domestique

Des recherches sont actuellement en cours concernant la possibilité d’extraire les métaux des déchets industriels. Si les techniques à l’étude deviennent économiquement viables, les députés souhaitent que le gouvernement fasse en sorte que les réglementations actuelles ne restreignent pas inutilement l’utilisation des réserves potentielles.

Les politiques d’extraction en vigueur encouragent, par exemple, une utilisation prudente, efficace et durable des minéraux, et le recyclage de certains matériaux afin de minimiser les besoins d’une nouvelle extraction. L’autorisation de mettre en place une nouvelle extraction est décidée au cas par cas, en prenant en compte un éventail d’autorisation de planification et d’impact sur l’environnement. La planification est une action dévoluée.

L’extraction domestique des métaux stratégiques permettrait d’alléger les risques associés à l’existence de monopoles étrangers. De plus, même si une activité minière au Royaume-Uni aura un impact environnemental, celui-ci sera sans doute moindre que si l’activité prenait place à l’étranger. L’extraction domestique permettrait ainsi de réduire l’exportation britannique d’impacts environnementaux. Il est important pour les députés que le gouvernement investisse dans la recherche adéquate, permettant de s’assurer que l’extraction domestique se fera avec le moins d’impact environnemental possible. L’industrie a également sa part à jouer, en montrant au public qu’une mine moderne peut être de bon voisinage.

Le gouvernement informe les députés que la majorité des propositions d’implantation d’activités minières doivent être accompagnées d’une déclaration considérant tous les effets environnementaux et leur minimisation. Dans la majorité des cas, l’industrie interagit avec les communautés locales avant de soumettre un projet et s’engage, à la fin de la période d’extraction, à remettre le site en état.

Il a été porté à l’intention des députés que des délais dans les processus de planification dissuadent certaines compagnies minières à considérer venir prospecter au Royaume-Uni. Afin de rentabiliser au maximum les ressources domestiques et dans le but d’accélérer les processus de planification, les députés recommandent au gouvernement de classer les mines, en particulier celles contenant des réserves de métaux stratégiques, en tant qu’infrastructure nationale d’importance.

Cette dernière recommandation est rejetée par le gouvernement. Le Localism Bill (projet de loi sur le localisme) va permettre de déplacer la prise de décision du gouvernement vers les individus, communautés et conseils. La majorité des décisions de construction seront prises localement. Le gouvernement a clairement spécifié que l’unité de planification des infrastructures majeures (Major Infrastructure Planning Unit) ne sera pas responsable de l’examen des candidatures à l’extraction d’agrégats et que cette responsabilité sera celle des mineral planning authorities.

— 

Notes :

1. Voir "Science et Technologie au Royaume-Uni", janvier-février 2011, p. 28

2. Quantité de métal présente dans des minéraux en concentration suffisamment élevée pour rendre son extraction économiquement viable.

3. Ensemble de documents légaux établis par le Parlement et réglementant les entreprises britanniques.

4. Source : Wikipédia.


Sources :
- Strategically important metals, House of Commons Science and Technology Committee, 4 May 2011
- Strategically important metals : Government response to the committee’s fifth report of session 2010-12, 7 September 2011


Auteur : Dr Maggy Heintz

publié le 26/01/2012

haut de la page