Symposium Algae for renewable energy à l’Université de Bath

Le 12 janvier 2011 s’est tenu à l’Université de Bath, un symposium autour de la culture des algues intitulé Algae for renewable energy (utilisation des algues comme source d’énergie renouvelable). A cette occasion, des chercheurs issus de diverses universités britanniques (Bath, Cambridge, Newcastle, Exeter, University College London, Imperial College London, University of Surrey, University of the West of England) et du Plymouth Marine Laboratory ont présenté leurs travaux et l’état de l’art de la recherche dans ce domaine, ainsi que les raisons qui les poussent à s’intéresser à cette thématique.

La culture d’algues fait partie des voies envisageables pour la production de biocarburants. De manière générale, l’utilisation de ces biocarburants permet de faire face à un ensemble de défis auxquels le secteur de l’énergie est confronté. Il est en effet bien connu que les réserves de gaz et de pétrole mondiales sont finies et qu’il convient de trouver des solutions alternatives aux carburants fossiles qui en sont issus, d’autant plus que la demande mondiale en énergie est vouée à augmenter au cours des prochaines années. Par ailleurs, la place ménagée aux énergies renouvelables dans le mix énergétique doit augmenter afin de contribuer à la lutte contre le changement climatique. Dans ce contexte, il est indispensable de disposer de carburants liquides issus de sources renouvelables pour certaines applications particulières fortement consommatrices d’énergie au premier rang desquelles l’aviation.

Partant de ce constat sur la nécessité de se doter d’une capacité de production de biocarburant conséquente, quels seraient les avantages que présenteraient les algues par rapport aux cultures oléagineuses conventionnelles ? Elles répondent tout d’abord au principal problème soulevé par l’utilisation de grandes surfaces de terres arables pour produire des biocarburants, à savoir la compétition avec les cultures alimentaires, puisque leur culture ne se fait pas sur des parcelles agricoles classiques. De surcroît, grâce à un taux de croissance bien plus rapide, à la forte teneur en huile de certaines variétés, et à la possibilité de réaliser plusieurs récoltes par an, la production de biocarburants à partir d’algues requiert des surfaces beaucoup plus faibles que l’alternative exploitant des cultures oléagineuses. Ainsi, selon certains chercheurs, les 27 milliards de litres de biodiesel qui couvriraient la consommation annuelle du Royaume-Uni pourraient être produits à partir de 0,8 Mha de culture d’algues, soit beaucoup moins que les 17,5 Mha de cultures nécessaires autrement (valeur considérable lorsqu’elle est mise en perspective avec les 24 Mha de terres dédiées à l’agriculture disponible sur le sol britannique) ! Enfin, un autre élément favorable aux algues réside dans la possibilité d’obtenir différents carburants (hydrogène, méthane, bioéthanol ou biodiesel) en utilisant différents procédés d’extraction.

Si la culture des algues destinée à produire des biocarburants semble donc une possibilité quasiment incontournable, de nombreux défis et axes de développements attendent les chercheurs qui se consacrent à ce sujet à l’heure actuelle. L’objectif est bien évidemment de rendre cette culture économiquement viable, notamment en améliorant la productivité et en réduisant les coûts d’investissement associés aux installations. Les pistes sur lesquelles travaillent les universitaires présents à Bath lors de ce symposium sont diverses, et témoignent des interactions entre biologie, génie biologique et génie chimique existant sur la thématique des algues :
- l’identification de nouvelles variétés d’algues afin de mettre en culture des spécimens plus robustes, présentant de meilleurs taux de croissance, supportant une amplitude thermique plus importante, fournissant de l’huile plus facile à exploiter ;
- l’adaptation de techniques d’une variété d’algue à une autre, rendue complexe par l’extrême diversité des espèces d’algues ;
- une meilleure compréhension des phénomènes biologiques ayant lieu dans les cultures, comme par exemple la façon dont les organismes absorbent la lumière ;
- la conception de nouveaux réacteurs, visant à accélérer la croissance des algues ainsi qu’à permettre le passage à une production à l’échelle industrielle et mettant en jeu de nombreux paramètres (géométrie, matériaux utilisés, choix entre des photobioréacteurs fermés ou des cultures en bassins ouverts, exposition à la lumière, etc.) ;
- les procédés de traitement après récolte comme le développement de nouvelles techniques de catalyse pour accélérer l’extraction du solvant et l’obtention du biocarburant ;
- l’utilisation de techniques de modifications génétiques qui permettraient, par exemple, d’obtenir directement un biocarburant sans traitement après récolte ou bien d’éliminer les comportements des algues consommateurs d’énergie comme la mobilité.

Même si l’utilisation des biocarburants représente un débouché futur important pour les cultures d’algues, d’autres utilisations sont possibles dont les applications sont actuellement plus proches de la maturité technologique que la production de biocarburants. Ainsi l’obtention de produits à caractère pharmaceutique, à plus haute valeur ajoutée, fait l’objet d’un développement plus rapide, car les obstacles économiques sont plus aisés à surmonter. En outre, les algues peuvent être utilisées pour traiter des eaux usées ou pour fixer le CO2 à la sortie des usines.

Le symposium s’est conclu par la présentation du travail de l’entreprise japonaise DENSO, qui cherche à mettre à profit l’ensemble des utilisations possibles des cultures d’algues. Cet équipementier automobile a ainsi mis en place à la sortie d’une centrale de cogénération, qui fournit de l’énergie à l’une de ses usines, un système de démonstration constitué de bassins d’algues destinés à la fois à fixer le CO2 émis par la centrale, à utiliser l’eau et la chaleur issues de cette centrale pour favoriser la croissance des algues, et à produire du biocarburant ainsi que des sous-produits à haute valeur ajoutée. L’entreprise est donc amenée à travailler sur plusieurs projets de recherche sur les algues en collaboration avec le MAFF (Ministry of Agriculture, Forestry and Fisheries, ministère de l’agriculture, des forêts et des pêches) japonais, avec des universités (Bath, Keio, etc.) ou avec d’autres entreprises (Toyota).

Cette rencontre a montré que la recherche sur les biocarburants à base d’algues est bel et bien à l’ordre du jour et qu’il s’agit véritablement d’une source d’énergie renouvelable sur laquelle il serait extrêmement intéressant (voire indispensable) de pouvoir compter à l’avenir. Cependant, selon certains intervenants, il semble que dix à quinze années soient nécessaires avant de voir émerger une utilisation à grande échelle des algues en tant que source d’énergie renouvelable.


Auteur : Joël Constant

publié le 21/03/2011

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