Un autre mode de stockage de l’énergie
Le stockage de l’électricité représente un enjeu à part entière. Il s’agit déjà d’une thématique importante liée à l’irrégularité de la consommation électrique, mais son importance est vouée à augmenter à mesure que la production d’électricité elle-même verra sa régularité affectée par la pénétration des énergies renouvelables. Les solutions généralement envisagées pour emmagasiner l’électricité générée en excès lors des phases où la demande est faible sont l’utilisation de batteries et celle de barrages dans lesquels l’eau est remontée grâce à des pompes. La construction de centrales de stockage d’énergie par le froid fait partie des voies alternatives. La première installation de ce type au Royaume-Uni est sur le point d’entrer en exploitation. Située près de Slough, dans le comté de Berkshire, elle est gérée par la société britannique Highview Power Storage.
Le principe régissant le fonctionnement de la centrale est fondé sur un cycle de changements d’états de l’air. Dans un premier temps, l’électricité générée en excès est utilisée pour refroidir de l’air jusqu’à une température de -190 °C. Mis en réserve dans un réservoir à la pression atmosphérique, l’air liquide résultant est, lorsque le besoin s’en fait sentir, mis sous pression (70 bars) et réchauffé au moyen d’un échangeur de chaleur, puis utilisé pour entraîner une turbine et générer de l’électricité. Le froid récolté dans l’échangeur de chaleur lors de la vaporisation est stocké au moyen de méthodes inspirées de l’industrie chimique, et sert à refroidir l’air lors des cycles ultérieurs.
Ce système affiche un rendement d’environ 50%, mais ce chiffre peut grimper jusqu’à 70% si la chaleur provenant d’une usine ou d’une centrale de production d’énergie voisine est utilisée pour réchauffer l’air liquide. L’installation de Slough est implantée sur le site d’une centrale de production d’électricité à partir de biomasse, et peut donc mettre à profit la chaleur issue de celle-ci pour améliorer notoirement son efficacité. Avec un tel résultat, le stockage d’énergie par voie cryogénique présente un bilan voisin de celui des barrages hydroélectriques utilisés pour le même type d’applications (rendement allant de 65 à 75%), et seulement légèrement défavorable par rapport à celui de batteries (de 80 à 90%).
La méthode employée par Highview Power Storage présente de nombreux avantages. Elle est bien plus flexible d’utilisation qu’un barrage hydroélectrique en ce sens qu’elle peut être installée partout, et qu’elle requiert moins d’espace. De surcroît, par rapport aux batteries, le coût des matériaux utilisés reste modéré. Ainsi, l’entreprise estime qu’une fois la technologie mature, les dépenses d’investissements de capital seront de 1.000 $ par kW de capacité de production d’électricité, soit quatre fois moins que pour des batteries, et entre deux et quatre fois moins que pour un barrage.
L’usine pilote de Slough, d’une capacité de 300 kW, dirige déjà de l’électricité vers le réseau depuis avril 2010, et ce à partir d’approvisionnements externes en air liquide. Avec l’ajout sur le site des capacités de liquéfaction, l’ensemble du cycle va pouvoir être réalisé sur place. Le plan de marche défini prévoit d’atteindre une capacité de 3,5 MW d’ici à la fin 2012, avant de passer à 8 à 10 MW à l’horizon 2014.
Le projet est soutenu par le Department of Energy and Climate Change (ministère de l’énergie et du changement climatique), qui lui a attribué en 2010 une subvention de 1,1 M£.
Sources :
The Engineer, 28/02/2011, p. 6
NewScientist, 28/02/2011, http://redirectix.bulletins-electroniques.com/KBN8E
Highview Power Storage, http://www.highview-power.com/wordpress/
Auteur : Joël Constant